Contribution Reliance au colloque du 18 mai 2019

Bonjour à toutes et à tous

Merci d’être là pour chercher ensemble les moyens pastoraux pour toujours mieux accompagner, discerner, intégrer la fragilité et aujourd’hui plus particulièrement celle des couples chrétiens  engagés dans une nouvelle union.

Nous sommes Nathalie et Christian, mariés depuis plus de quarante ans, toujours parents de quatre grand enfants et grand parents de quatre petits enfant pour le moment. C’est grâce aux équipes Notre-Dame ( les END ) que nous avons rencontré les équipes Reliance. Elles venaient de voir le jour en réponse à une demande du pape Jean-Paul II dans les années 2000 …..Cette mission a été confirmée par le pape François, lors de l’audience de septembre 2015, confiant aux END « la pastorale des couples dont le mariage a échoué ». Deux semaines après, nous participions au synode de la famille, invités comme auditeur et auditrice au titre de coordinateur nationaux des équipes Reliance, équipe de couples de chrétiens divorcés, engagés dans une nouvelle union : C’était la première fois que cette pastorale était officiellement invitée.

Chris     Qu’est-ce qu’une équipe Reliance ?

Ce sont des couples engagés dans une union stable qui souhaitent une croissance de leur vie chrétienne sous le regard du Christ en couple et en équipe.

Etant une émanation des Equipes Notre-Dame, les équipes Reliance suivent de près la pédagogie des END, inspirée par le père Caffarel : même organisation des réunions, même thèmes. La différence vient de la singularité des parcours de vie de ses membres et du fait qu’un couple équipier des END chemine avec eux, comme compagnon de route. Il y a également un prêtre, conseiller spirituel ayant le même rôle que dans une équipe Notre-Dame.

Un accent particulier est mis sur le dialogue en couple (le fameux, DSA), sur la prière à deux et sur la retraite d’équipe. La première année est très importante pour établir, pas à pas, la confiance entre les membres. En effet, ils ont souvent été confrontés à  un accueil récalcitrant de l’Eglise, des paroles blessantes d’amis catholiques, et des interdictions abusives de la part de certains clercs. Cette confiance s’installant, le partage devient de plus en plus profond, l’écoute et l’entre ’aide permettent d’avancer avec clarté vers une belle sérénité pour poursuivre la construction de cette nouvelle union et la remettre entre les mains du Seigneur souvent d’ailleurs, en la confiant lors un temps de prière.

Nath

Les équipiers sont tous des membres actifs de leur paroisse, leurs enfants sont baptisés, ils vont au caté, aux scouts ou à Taizé ! Fidèles de la messe dominicale, ils se posent depuis longtemps la question de leur participation à la communion eucharistique. Depuis longtemps, c’est en conscience éclairé que certains ont repris le chemin de la communion sacramentelle, tandis que d’autres ne communient pas dans un esprit d’obéissance ou quelques fois seulement à des occasions particulières (baptême, première communion, mariage ou enterrement des proches). Ainsi dans une équipe Reliance, on rencontre toutes les attitudes, on en parle en respectant le choix des autres. Les situations évoluent parfois au cours du temps et ne sont pas nécessairement les mêmes au sein d’un couple.

Il est à noter que dans Reliance, les équipiers ont tous des « statuts canoniques» différents. Pour un tiers environ des couples l’un des conjoints n’a jamais été marié, certains ont tous les deux obtenu leur reconnaissance de nullité de mariage, certains sont devenus veuf et veuve de leur ex-conjoint.

Ce qui les rassemble c’est l’expérience d’une rupture conjugale et de la construction d’une nouvelle union en famille recomposée avec la gestion des relations à toujours mieux pacifier avec une ex-famille.

Ces situations de famille recomposées se rencontrent également dans des couples en situation dite « regulière ». Par exemple, en préparation au mariage, nous rencontrons, de plus en plus souvent, des couples en situation humaine similaire : ils ont vécu une rupture conjugale hors mariage religieux, souvent hors mariage civil ou même pacs, et ils ont eu un ou plusieurs enfants. Dans ce cas, ils pourront se marier à l’Église, entre guillemet, « sans problème », mais sans accompagnement particulier. Même situation pour les personnes, qui, ayant obtenue une reconnaissance de nullité s’engagent dans une nouvelle union sacramentelle, ou pour les veufs ou veuves qui vivent une nouvelle union avec la délicate question de familles recomposées pour eux aussi .

Chris

La réflexion des Equipes Reliance

Toutes ces questions revenant souvent dans les échanges entre chrétiens, les équipes Reliance ont beaucoup travaillé pendant la période inter synodale pour envoyer des contributions pour le synode de 2015. Elles ont accueilli l’exhortation Amoris laetitia avec joie, et ont donc chercher comment mettre en pratique concrètement ces cheminements que propose le pape François. Un grand questionnaire envoyé à tous les équipiers a permis de cerner les attentes et de définir des modalités possibles pour ceux qui exprimaient une attente sacramentelle. Ils reconnaissent la pertinence de visiter les domaines de discernement proposé par Amoris laetitia, pour avancer dans la reconstruction personnelle, pour poursuivre la  pacification des relations à l’ex-conjoint, aux enfants, aux familles, aux communautés, à l’Eglise. Ils reconnaissent aussi la nécessité d’une équipe de cheminement spirituel  pour enraciner leur nouvel engagement dans la  foi et préciser leur demande sacramentelle.

 Ainsi, à partir de l’Evangile de Bartimée, qui était celui de la messe de clôture du synode de 2015, et que le pape a largement commenté, a été construit un processus  d’intégration. Il passe par la conversion des communautés qui doivent accueillir, et par le discernement personnel qui doit s’articuler avec le discernement  pastoral, car, nous le dit le pape François, « il faut intégrer tout le monde » et « la logique de l’intégration est la clef de leur accompagnement pastoral, afin que non seulement ils sachent qu’ils appartiennent au Corps du Christ qu’est l’Église, mais qu’ils puissent en avoir une joyeuse et féconde expérience » A.L. 299.  Et comme nous l’a justement rappelé Hèlène Bricout toute à l’heure, conversion et discernement ont été confirmé par le rescrit pontifical  du 5 juin 2017 comme magistère authentique.

Ainsi sont nés les cheminements Bartimée, à bien mettre au pluriel car à partir du processus qui repose sur la phrase centrale «  Que veux-tu que je fasse pour toi », plusieurs réponses peuvent donner lieu à des modalités de cheminements différents pour s’adapter à des personnes, des groupes, des mouvements, ou des communautés particulières.

Ainsi, Les équipes Reliance ont créé, pour leurs équipiers, un thème d’année nommé Bartimée pour un discernement en huit étapes comme le sont les thèmes d’études des équipes. Les équipes ont également initié une expérience dans une paroisse proche. Cette paroisse en a fait son projet paroissial pour la rentrée 2016 en suscitant un petit groupe de personnes qui a cheminé pendant plus d’un an. Il comprenait des personnes divorcées engagées dans une nouvelle union, des personnes canoniquement mariées, un couple accompagnateur, lui-même ayant connu le divorce et le curé de la paroisse. Ils ont fait leur chemin tranquillement à leur rythme avec les étapes proposées par le processus Bartimée. Comme l’aveugle ils sont passés de la situation d’exclus, assis au bord du chemin, à celle de disciples debout qui suit Jésus. C’est au cours d’une célébration dominicale que les personnes ont fait leur demande officielle et que l’accueil du prêtre et de la communauté s’est exprimé dans un dialogue public. Une fois cette parole échangée, les personnes concernées se sont avancées  pour re-communier pour la première fois depuis plus de dix ans. Ce fut une immense joie dans l’assemblée et toute la communauté a senti se renforcer la communion ecclésiale.

Nath 

 Comme tous les accompagnateurs ici présents, nous avons maintes fois été témoins de la « résurrection », la résurrection de personnes qu’on avait laissées au bord du chemin à cause de leur situation dite « irrégulière », et qui deviennent à leur tour missionnaires quelques années plus tard. Nous avons vu la joie des communautés qui ont fait un petit pas pour mieux accueillir et intégrer ceux qui n’avaient pas pris le même itinéraire qu’eux.

En intégrant ainsi ces couples, la communauté s’enrichie de leur présence. Le pape François le souligne au N° 299 : « l’Esprit Saint déverse en eux des dons et des charismes pour le bien de tous. ».

Ils sont certainement les plus légitimes à accompagner à leur tour les différentes étapes de cette pastorale. Par exemple quelques uns de nos équipiers accompagnent des couples pour un temps de prière, d’autres un groupe de paroles pour personnes divorcées, d’autre encore un cheminement Bartimée. Mais leur charisme peut également les amener dans les autres services d’Eglise, et pourquoi pas, dans la préparation au mariage.

Un dernier point important est «d’aller dire ». Beaucoup de chrétiens ont quitté nos communautés à cause du mauvais accueil qui leur a été fait ou à cause de positions moralisantes du magistère. Comment faire connaitre, informer, expliquer ce changement du regard et ses manifestations concrètes à ceux qui  re-croisent rapidement nos communautés lors d’une célébration de baptême ou de mariage ou d’enterrement dans la famille…

Terminons par un beau fruit inattendu d’un des premiers cheminements Bartimée. Le compagnon d’une personne qui souhaitait entrer dans un cheminement de discernement était un homme un peu loin de l’Église.  Mais il avait accepté d’accompagner sa femme dans un cheminement Bartimée car il pensait que cela était important pour leur nouveau couple. Contrairement à elle, il n’a pas fait de demande sacramentelle puisqu’il n’avait pas de pratique dominicale. Mais au cours du premier anniversaire de la fin de ce cheminement, il s’étonnait lui-même en nous disant : « Avec votre Bartimée, moi qui ne mets jamais les pieds à l’Eglise, je commence à me poser des questions ! »

      Accueillons ces fruits de l’Esprit, osons l’Evangile, tout l’Evangile, et redisons la  parole de Marie chère aux Equipes Notre Dame :

« MAGNIFICAT ! »